« Travaux (On sait quand ça commence…) » (3)

Chantal (Carole Bouquet) est une avocate bobo: habillée Chanel, proprio d’un appartement style haussmanien et néanmoins passionaria de la cause des sans-papiers. Afin de déloger un soupirant importun (Castaldi père) qui menace de s’incruster chez elle, elle entreprend quelques menus travaux et fait pour cela appel à l’un de ses ex-clients. Cette mise en application de ses principes va lui valoir bien des déboires: l’architecte voit beaucoup, beaucoup plus grand qu’elle, et ses employés sont tous d’irrécupérables – mais très attachants – « bras cassés ».

Je ne sais pas trop ce qui m’a poussée à aller voir « Travaux ». Je ne suis globalement pas fan de comédies, et je n’ai pas de passion particulière pour Carole Bouquet. Mais je suis bien contente de l’avoir fait, car j’en suis ressortie avec un grand sourire et une pêche d’enfer. Outre quelques trouvailles savoureuses (Chantal qui plaide en dansant, d’où une mémorable scène de hip-hop dans un commissariat), le film navigue joliment entre humour et émotion. On pourrait lui reprocher un côté politiquement correct s’il ne tapait pas toujours si juste, si vrai, et s’il ne mettait pas le doigt sur les contradictions inhérentes à nos « bonnes actions ».

Exemple: Dans une scène où la famille et les ouvriers immigrés sont rassemblés autour de la table du petit déjeuner, Chantal jubile parce qu’elle a réussi à faire fermer un marchand de sommeil (vous savez, ces hôtels qui ont un accord avec les services sociaux pour héberger moyennant finances des familles en difficulté, dans des conditions souvent sordides). « Vingt euros par personne, à huit par chambre, non mais vous vous rendez compte? » s’indigne-t-elle très justement. Puis elle se tourne vers le jeune Noir assis à côté d’elle et lui fait remarquer qu’il a l’air crevé. « Mon hôtel a fermé, et mon cousin n’était pas là… » répondit-il simplement. Moralité: il a passé la nuit à la rue. On dit bien que l’enfer est pavé de bonnes intentions… [Cette scène tombe à pic en période de débat sur l’autorisation de louer les chambres de bonne de moins de 9 mètres carrés.]

Bref, la réalisatrice Brigitte Rouan prouve qu’avec des bons sentiments, on peut faire un film jubilatoire et dénué de mièvrerie.

« Travaux », c’est aussi un personnage de femme comme on aimerait toutes en être: énergique, généreuse, forte et fragile à la fois, qui ne perd jamais de vue l’essentiel et se bat jusqu’au bout pour ses idées. Et j’épouse le premier homme qui m’offre le manteau rose pétard qu’elle porte dans le film 🙂

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